-
menu
Seuil à tous égards intime:
Une source illumine une grenade… L’ombre est-elle plus nette ? Le rouge est diffus, le jaune demeure pour le moment dans l’ombre ; la baie ronde, à saveur aigrelette cache des cercles entourés d’une pulpe rouge ; grise, prise, reprise la fleur se réveille translucide et ce n’est pas de sa faute !
Seuil invisible :
Les éléments se touchent, s’unissent, se divisent, se retrouvent de nouveau, s’offrent au blanc, enfantent des plans superposés, conjuguent les frissons supplémentaires ; les zones hachurées refusent la combinaison...Que fait- on pour chasser l’humeur fondamentale du corps ? Inventer le noir enseveli.
Seuils :
Sur la possibilité d’aimer se fonde l’aimance … Il n’est d’encre que phosphorescente…Mensonge bien minuiste
Premier voyage :
Inonde, ô couleur ma naissance, mes babillages, ma petite fenêtre, ma franchise…La main qui a tracé retrace, s’entend, s’écrit, se regarde, se lit dans le même geste. C’est signe à signe, ligne contre ligne, tout contre, espace sur espace que le (عا) ouvrant le nom de l’artiste accueille le fil du prénom ; ça a mis combien de temps ? Selon une photographie archaïque, ce phonème est l’indice de l’œil ; cela donne une forme majeure au corps du voyant. Tel mouvement (remplir, superposer, effacer, s’accommoder, s’introvertir, apparaître, désemplir, creuser, disparaître) permet enfin une sorte de libération de l’entretien tête à tête. C’est une sorte d’attaque plastique, musicale, hallucinatoire et de reprise rêvée…Il s’agit d ‘une substitution, distribution, aux marges de l’indicible : des débris d’éternité, des os bleus, un scintillement par-ci, l’au-delà du désir par-là, un vert comme verdure, une amplitude irréductible, une intrusion féminine, un masculin blanc avec un noir nu, une densité entre le bleu fossile, le rouge qui titube, le jaune voyou et bien d’autres indices à la fois…Le ( عا ) lancine, se transforme, habite l’aplat : personne ne reçoit quoi que ce soit qui ne viendrait pas de lui-même ! ( مر ) le verbe se cherche dans le corps amer, l’artiste maintenant doseur se trouve scellé à la génération, à l’entremêlement, au feuillage, au don par le nom…
Deuxième adversaire :
Le point en colère se tourne vers le cercle et se met à vivre le cycle de ses mutations. La succession d’aventures et d’éclats annonce la progression rarement régressive. Le géologue ou l’astrologue ou l’arpenteur ou le paléontologue ou le chimiste laisse venir le murmure évolutif des strates en formation permanente. Le nom porté par le geste de haute musique vit, vogue, mais ne rompt jamais les traces de ses gravitations. Il n’est point collage dans la lumière du jour, ni écriture saignante, ni larmes de terre mouillée. Que serait-il alors ? _ Foyer d’éclairs, force tactile…
Troisième station :
Le promeneur fait jouer les différences au lieu de nous enchanter une fois pour toutes ; il visite le vivier des signes sensibles, produit des variations au lieu d’habiter définitivement la dimension ; il apporte des matériaux assurant le renouvellement de l’évasion ; il brasse rythmes, couleurs nouvelles, nous montre un réservoir de comparaisons, fournit la démesure du réel, étalonne les processus et laisse revenir l’hésitation. Tant il est vrai que, à tort ou à raison, toute ressemblance est une illusion : porte du lisse, avant-limite de la craquelure…Pourquoi donc la nuit déchire-t-elle sa sculpture, le jour brûle-t-il ses dernières certitudes, le matin assassine -t- il ? La terre se couvre de tons bruits bruns, de douleurs indigo ; l’envie s’ouvre aux lèvres cramoisies. Un matin printanier ne meurt jamais…
Quatrième adversaire :
C’est l’ébullition de la matière. Je porte mes rumeurs et mes humeurs, plie et replie ma dernière colère, rumine ses ampleurs et tisse quelques instants de teintes inédites. Je produis une nouvelle caresse, mélange le rugueux et le doux, provoque un divorce transitoire de l’acrylique et de la colle ; c’est grave mais cela ne donne aucune gravure ; je capte la parole silencieuse, tord le coup de l’étendue, invite les astres, boit les nuages, respire le vaporeux, tente une autre fugue, évite la béance... Belle illusion ! L’argile palimpsestueuse refuse de s’inscrire dans le figement.
Sortie honorable, disons conclusion provisoire :
L’invisible promet de reprendre la parole, l’inconnu désire se montrer, le désordre vibre… C’est peut-être l’encre à l affût de la blancheur entêtée, un brouillon extime… Entends la chute du rouge, l’ocre semble pour le moment dans l’attente ; tout à l’heure un cliquetis lui donnera des ailes. Je t’assure que l’odeur de femme née de formes fines ne laissera jamais seule la belle blessure au flanc de l’infini …
Habib Ben Salha